Une pluie de septembre

Anna Bailey

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    16 novembre 2023

    Etats-Unis, famille

    Disons-le tout de suite, cette lecture m’a mis mal à l’aise à cause de la violence omniprésente : un père qui bat femme et enfants, un pasteur qui appelle à la haine, un employeur raciste, des ados qui boivent pour oublier, des adultes qui se taisent, un jardin rempli de petits os de mammifères.

    J’ai eu du mal à cerner Abigail, la jeune fille qui disparait une nuit de septembre dans la petite ville de Whistling Ridge dans le Colorado.

    J’ai eu de la peine pour ses frères : Noah l’aîné qui n’a pas pu partir à la fac, et Jude le dernier à la jambe cassée. Leur mère m’a énervé à cause de sa mollesse.

    Bien sûr, j’ai détesté le père, revenu du Vietnam bien abîmé, qui se complait dans un culte chrétien adapté à sa petite personne dans lequel il décide qui doit faire quoi ; son reproche omniprésent envers les autres de na pas avoir le cran ; son enfance sous la coupe de sa mère ogresse, ses coups de pieds dans l’arrière des chevilles de sa femme. Bref, un homme qui cherche à faire mal parce qu’il souffre lui-même beaucoup sans le comprendre.

    J’ai aimé Rat, le jeune roumain venu d’Angleterre qui habite dans le village des caravanes, un peu en marge. J’ai aimé qu’il appelle les filles Draguta : mignonne.

    Je n’ai pas aimé le shériff de la ville que j’ai trouvé bien mollasson.

    Et je n’ai pas aimé non plus le gros employeur de la ville qui semble diriger tout le monde en sous-main.

    Et pourtant, malgré tous ces personnages détestables, j’ai suivi avec passion cette étrange disparition : avant et après, les deux temporalités s’entremêlant tout au long du récit.

    J’ai soupçonné tour à tour à peu près tous les hommes du village, imaginant même qu’Abigail n’était pas morte, mais j’ai été scotché par le coupable.

    Un roman noir sur le racisme et la foi dans une petite ville américaine.

    Quelques citations :

    mais les hommes, on leur laisse le droit de grandir avec la certitude que le monde leur appartient, tandis que les femmes n’ont pas cette option. Alors quand vient la quarantaine, ils se demandent pourquoi la promesse ne s’est pas encore réalisée et, si une femme a le malheur de se trouver sur leur chemin, elle en prend plein la figure. (p.104)

    de ces gens tellement furieux que Jésus ne les change pas en vin. (p.260)

    Dieu, il vient toujours à point pour pardonner aux hommes les horreurs qu’ils font aux femmes. Mais Il n’empêche jamais que les femmes les endurent, ces horreurs. (p.346)

    L’image que je retiendrai :

    Celle de la croix couverte de pierreries qui cache le trou dans le mur fait par le poing du père.