C EST DE FATIGUE FERMENT YEUX, récit

Claire Fourier

Bartillat

  • Conseillé par
    28 février 2012

    Le fil d'Ariane

    Du vendredi au lundi, de l'annonce de la mort à la fin de la cérémonie, et la description de ces jours que l'on n'oublie jamais, même plusieurs mois après.
    Claudie arrive dans le Finistère où est située la maison familiale, sa mère est décédée brutalement. Nous la suivrons du vendredi au lundi, grâce à ce texte écrit un an et demi après.
    Ariane était veuve depuis de nombreuses années, seule également, n'ayant pas tenté de refaire sa vie. Elle vivait dans un grand sentiment de peur incontrôlée, cette mère qui ne fut pas exempte de reproches, omniprésente, profonde sans en avoir l'air, insaisissable et changeante. Elle est morte d'après sa fille de solitude et aussi usée par les grossesses successives, quatre enfants en peu de temps, Claudie se rappelle la pension à partir de dix ans, le logement trop petit et les enfants turbulents comme tous les autres.
    Les deux femmes se ressemblaient physiquement beaucoup, mais la mère tente de garder une emprise sur sa fille par des lettres et des coups de téléphone qui est, dit-elle, son seul luxe !


    Elle était très critique pour juger des écrits de sa fille ; en citant« Métro ciel » elle parle d'explosions hormonales, et se demande aussi pourquoi avoir écrit « Vague conjugale ».
    Les jours passent, l'émotion est toujours présente, mais la vie pour le reste du monde continue tant bien que mal, il faut préparer les funérailles, prévenir la famille, s'occuper des papiers, choisir le cercueil et recevoir le prêtre qui officiera le lundi, préparer éloge funèbre et malgré toute la peine, manger, dormir et accomplir toutes les contraintes corporelles des vivants.
    Un grand moment d'émotion pour l'auteure (moment que je partage) est l'écoute dans l'église, au cours de la cérémonie funèbre du « Kantik ar Baradoz » (Cantique du Paradis) et la malice d'avoir imposé ce chant à sa mère (Castillane) peu portée sur les traditions bretonnes.
    Ariane, la mère, être encore plus présent, bien que disparue mais dont le corps est là pour prouver encore pour quelques jours son ancienne existence terrestre. Personnage riche en couleurs et en contradictions, à la fois énervante et attachante.
    Claudie, (Caudie comme l’appelle sa mère) subit ce deuil inattendu de plein fouet, tente d'assumer mais le corps présent et le fantôme passé d'Ariane envahissent sa pensée et ravive son chagrin.
    Roland le fils, Odile son épouse font partie de la famille et sont les proches voisins d'Ariane et une aide précieuse pour Claudie.
    A noter la présence d'un personnage que je qualifierai d'historique, un dénommé Alphonse Arzel député maire de Ploudalmézeau célèbre pour son combat contre le groupe pétrolier Amoco suite à la catastrophe de l'Amoco-Cadiz. Un clin d’œil bien mérité.
    Un huit-clos dans une maison entre une femme et le corps de sa mère décédée, avec tout ce que cela comporte d'émotions, de souvenirs, de regrets ou de remords et de tentatives pour nier la situation. Mais Ariane est morte, ce fût brutal, inattendu, mais hélas bien réel !
    C'est comme d'habitude chez cette auteure bien écrit sur un sujet pas très évident, une femme confrontée à la mort de sa mère et devant gérer son émotion, mais aussi les tracas administratifs, ainsi que les souvenirs dus au fait de revenir dans une demeure où elle a vécu jadis.
    Un livre que j'ai beaucoup aimé mais dont j'ai du mal à parler tant il me semble décrire des sentiments très (trop ?) personnels.