Psy, pute, curé

Psy, pute et curé ont pour fonction d’accueillir, pour des raisons et selon
des modalités différentes, celles et ceux qui ne peuvent faire autrement que
payer pour obtenir ces services. Ce rôle de réceptacle de ce que la société ne
peut métaboliser et évacuer ailleurs suffit-il à expliquer leur statut à part
? (Dans la nomenclature d’activités française de l’INSEE, psys et putes
apparaissent dans une même catégorie : « autres services personnels non
classés ailleurs »…) Comment penser et vivre cette situation de marginalité,
avec des métiers qui engagent l’identité même de celles et ceux qui les
exercent ? En convoquant la philosophie (Norbert Campagna), la sociologie
(Claude Fossé-Poliak, Françoise Gil, Stéphanie Pryen, Céline Béraud), la
psychologie sociale (Gail Pheterson), l’histoire (Alain Corbin, Ralph Gibson,
Caroline Muller), l’anthropologie (Pascale Absi) et en se fondant sur les
documents du Vatican, les témoignages de psys et les écrits de militantes et
travailleuses du sexe (Virginie Despentes, Grisélidis Réal, le manifeste du
Strass), le psychologue et psychothérapeute Antoine Guénin analyse les enjeux
propres à ces trois pratiques. Prenant garde à bien définir ce qu’il entend
par psy, pute (terme qui ne comprend pas, dans ce livre, les femmes mises en
esclavage sexuel) et curé, il compare les cadres d’exercice – des dispositifs
spatiaux aux vêtements, en passant par le rôle de l’argent ou l’importance du
secret –, les mécanismes psychologiques à l’œuvre, les idéologies de métier,
les risques socioprofessionnels (solitude, violence, épuisement), les
compétences et leurs modes d’acquisition et de développement. Si la relation
intime est clairement au cœur de la confession, de la séance et de la passe,
Antoine Guénin va plus loin et affirme que la prestation relationnelle ne peut
pas être de qualité si elle ne prend pas sa source dans l’amour. Mais de quel
amour s’agit-il ? Dans cet essai brillant, l’auteur cherche non seulement à
mieux cerner les contours de son métier, mais aussi à bousculer des
catégorisations trop peu remises en cause. Le tout, sans jamais oublier d’où
il parle, ni vouloir parler à la place des autres. Après une première vie
professionnelle au sein d’établissements financiers, Antoine Guénin a opéré
une profonde reconversion en devenant psychologue clinicien et
psychothérapeute. Il a commencé à exercer en libéral en 2011 auprès d’un
public d’adultes dans la région bordelaise, où il réside. Son parcours de psy
est nourri d’une longue analyse dans la lignée de Carl Gustav Jung, de
l’approche existentielle d’Irvin Yalom, de la perspective humaniste de Carl
Rogers, ou encore des apports en ethnopsychanalyse de Georges Devereux et
Tobie Nathan, et plus généralement des champs disciplinaires dédiés à la
compréhension de l’être humain. Psy, pute curé est son premier livre publié.